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Publié par DASES-SUPAP-FSU

Engagé.e.s

Nous nous sommes engagé.e.s dans le travail social. Chacun.e de nos côtés, dans différents services parisiens, à différents postes. Tout.e.s plein.e.s de bonne volonté. Et avec l’amour de notre métier. On ne se connaissait pas, mais déjà, l’envie de travail social nous réunissait.

Et puis les années ont passé. Les conditions de travail se sont dégradées. Nos fauteuils ne sont pas devenus moins confortables, nos salaires n’ont pas baissé, on n’a pas perdu la sécurité de l’emploi, non : on a juste eu de plus en plus de difficultés à accompagner nos « usagers ».

Engagées pour l’humain, on s’est retrouvées broyées par des technocrates pour qui l’important n’était plus qu’on crée du lien mais qu’on clique dessus.

Noyées par les procédures. Rationalisées. Taylorisées.

Polysaturé.e.s.

 

A l’école on avait appris, pendant 3 ans, à parler éthique, veille sociale, respect de « l’usager », accompagnement individualisé... Tout service public qu’on soit, on essayait au quotidien de travailler avec le rythme des personnes accompagnées, de leur proposer autre chose que du standardisé, pour mieux nous adapter à ceux qui, comme Zézette, ne rentrent pas dans les cases, « parce que ça dépend, ca dépasse ».

J’avais appris à Rabelais qu’une demande c’est toujours une demande d’amour, et (quelques soient mes moyens) à mettre un point d’honneur à dispenser de l’attention à tous ceux qui, franchissant la porte de nos services, venaient en demander.

Mais quelque part, là haut, ils ont décidé de tout codifier, ficher, procéduraliser, uniformiser... L’urgence pour nos directions s’est déplacée de la personne au fichier.

On a prétendu transformer l’accompagnement, notre art, en une série « d’actes pros » standardisés. Les débats, les questionnements éthiques essentiels pour faire évoluer nos pratiques, ont disparu des réunions. Des lieux où nous échangions entre professionnels, ne sont plus restés que des lieux où l’on annonce, mois après mois, toujours plus de nouvelles missions, procédures, formulaires, logiciels, absences à remplacer... toujours moins de partenaires, de temps pour bien faire.

Le moment est arrivé où professionnellement, éthiquement, intellectuellement... ça ne suffit plus ! Le moment où, chacun.e de notre côté, nous nous sommes dit : « ça suffit ! ».

 

C’est le moment où on s’est réuni.e.s, où on s’est rencontré.e.s. Où on a décidé de créer ce qu’on ne trouvait plus au travail : un espace pour échanger, débattre, se soutenir, partager et progresser ; un espace pour défendre le travail social, nos métiers, nos missions, nos services, le droit des personnes accompagnées à être non seulement reçues mais entendues et respectées !

On ne se connaissait pas ou peu. Novices du syndicalisme, jeunes et moins jeunes, timides et extraverti.e.s, adeptes de la sobriété et fans de Desigual... Uni.e.s par une évidence, des convictions simples : humaines. Il y a eu une centaine d’engueulades, un millier d’objections (parce que « je suis pas d’accord »), un millions de fou rire et puis des liens d’amitié inattendus si ce n’est improbables sont nés.

 On ne savait pas où on allait, aucune idée du travail que ça nous demanderait de créer une section syndicale. Il y a eu le blog, les instances, les audiences, les réunions, les soirées « sociales conviviales » et puis les « Toquées de l’éthique » qui sont nées…

 En nous réunissant, en reprenant la parole, le droit à réfléchir qu’ils prétendaient nous ôter : nous avons gagné ! Nous avons repris le plaisir, redonné sens à nos pratiques, à ce qui fait qu’on aime nos métiers.

Et dans un monde où les chiffres font la loi, nous n’avons pas – malgré leurs manœuvres les plus honteuses – perdu la foi ! Loin de nous retirer l’amour de notre travail, ils nous ont donné des raisons de nous y engager davantage !

 

Alors oui, on a pris des (grosses) claques. On traine désormais une étiquette « syndiqué.e » et les kilos de préjugés qui vont avec.

Mais on est toujours là, avec les convictions qui ont fait de nous des travailleurs sociaux intactes.

Debout pour nos métiers, services médico-sociaux, personnes accueillies et accompagnées. Pour défendre, derrière la question des moyens qui nous sont donnés pour travailler, tout un projet de société: l'Humain, les moyens de l'Être.

 

Engagé.e.s.

 

Séverine

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