Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog

Publié par DSOL-SUPAP-FSU

La Permanence Sociale d'Accueil (PSA) Bastille est le service social au service des hommes parisiens sans domicile âgés de 25 ans révolus. Nous partageons ici un texte rédigé par ses agents, alertant sur la réalité de ce service et les réels moyens donnés pour l’accueil des populations sans domicile fixe à Paris, cachée derrière la communication de la Ville de Paris. La PSA sera prochainement en grève, soutenue par l'intersyndicale CGT - SUPAP FSU, nous appelons l'ensemble des agents et citoyens concernés par la situation des sans domicile à Paris à les rejoindre et soutenir.

   PSA : Le  naufrage de la solidarité

 

La mairie de Paris ne cesse de montrer son engagement envers les personnes en grande exclusion. Dans le pacte parisien de lutte contre les exclusions de 2022 à 2026, lors la mobilisation générale sur l’urgence sociale, la nuit de la solidarité du 26/01/2023 et  la réforme des PSA-ESI. Madame Hidalgo crie sur tous les toits que seule Paris se bat pour les plus exclus. Dans les faits, la PSA Bastille, un des services de la Ville de Paris dédiés aux personnes sans domicile fixe,  ne peut plus répondre à  ses missions : c’est un vrai naufrage et une souffrance pour le public.

Depuis 2020, les SMS assurent l’accueil à  la PSA Bastille du public SDF (guichet de 8h30 à 13h puis 13h 17h pour recevoir 3200 personnes par mois). Elles leurs  proposent une primo-évaluation, une réorientation et une inscription sur les plannings de réception. Cet accueil est indispensable pour le lien avec les usagers et permet  par sa qualité de désamorcer les situations d’agacement face à un flux immense du public. Les conditions nécessaires ne sont plus réunies pour assurer un accueil respectueux des personnes reçues.

Actuellement sur les 8 postes dédiés de SMS, 3 postes sont pourvus dont une personne sur le départ au 07/02/2023 et deux agents de la PSA Bastille  présents. Ces dernières Sms, présentes en poste depuis seulement 7 mois n’ont pas pu bénéficier d’une formation complète et ne sont pas en capacité de remplir toutes les missions demandées. Or à ce jour, ce sont elles qui devront  former les nouvelles arrivées. A cette situation, la DSOL répond par l’arrivée d’un poste ½ en ESI pour une durée d’un mois. Un accueil dégradé a dû être mis en place durant deux semaines (celle du 26 décembre et celle du 16 janvier) : guichet social fermé.

Cet état de fait n’est pas nouveau, depuis 2020, l’équipe des SMS est en souffrance. En l’absence de titulaire, le service a vu plusieurs passages de contractuelles malmenées (contrats faits et défaits et refaits en dernière minute, arrêts maladie provoqués par l’usure), des sortantes de concours qui ne restent pas, des contractuels qui ne restent pas...  dont le dernier en janvier 2023 qui est parti au bout d’une semaine. Deux recrutements par détachements étaient prévus pour arriver début janvier 2023 mais sur décision des services centraux, leurs demandes ont été rejetées. Puis finalement face à la crise, l’une d’entre elles a finalement été recontactée pour une prise de poste.

Au-delà de leur  mission d’accueil, nos secrétaires sont le pivot de notre service social. Elles assurent le suivi des dossiers de tous les services présents et travaillent en lien avec : direction, travailleur social d’accueil et d’accompagnement, le Service d’accès aux droits, la médiatrice, les partenaires et le lien avec les usagers via l’adresse générique de la PSA. Leur absence fait tout dérailler et met à mal toute l’institution. A ce jour, certaines tâches ne sont plus effectuées : la gestion de la boite générique, le transfert des dossiers et gestion des doublons, attribution du public nouvellement accueilli, gestion du courrier PSA, gestion de l’orientation vers la bagagerie, rendez-vous donnés sur les permanences PSA …

On vous rappelle que notre public est un public SDF. Avec pour urgence absolue l’ouverture des droits, l’accès à l’hébergement et au logement.

Des chiffres qui vous donneront un petit frisson :

- en moyenne 3200 passages mensuels en 2022 comptabilisés sur la PSA Bastille.

-  500 personnes en attente d’attributions d’une assistante sociale d’accompagnement.  

- Minimum 3 mois d’attente pour être suivi par une assistante sociale d’accompagnement

- 7402 personnes bénéficiaires du RSA qui devraient bénéficier d’un accompagnement mais restent dans le stock.

Et pour finir les travailleurs sociaux d’accompagnement ont une file active de 94 personnes. A cela s’ajoute les  609 personnes qu’elles suivent dans le cadre de la Permanence Psa.

Il est facile d’imaginer, pour des personnes SDF l’impact de telles conditions sur leurs vies déjà bien abimées.

Les conséquences :

Nous pensons avant tout à notre public qui reste le plus impacté face à un accueil aussi dégradé. Actuellement, les Messieurs  sont obligés de venir à 5-6 h du matin pour espérer être reçus, malgré la période de grand froid. Cela engendre de la maltraitance, donc en retour de l’agressivité et surtout beaucoup de non recours. L’absence du traitement des mails génériques a des conséquences pour les messieurs suivis déjà en accompagnement dégradé sur la permanence PSA. : Ils ne peuvent plus prendre de rendez-vous pour répondre aux  propositions/attributions de logement, demande de FSL, coupure de droits (CAF, DLS,…). Le lien partenarial est aussi gravement impacté. Les partenaires font remonter leurs mécontentements : difficultés à joindre la PSA/ délais de traitements immenses. Ils n’osent plus nous orienter des personnes.

N’est-ce pas pourtant le cœur des enjeux posés par le pacte de lutte contre les exclusions ?

Mais ce n’est pas tout

Regardez un peu les impacts sur tous les services : 

Pour les assistantes sociales d’accueil :

La pression est toujours plus forte sur les assistantes sociales d’accueil : on leur demande de recevoir toujours plus. Le délai de mise en accompagnement étant de 3 mois, elles assurent un suivi minimum des personnes qui attendent de voir leur référent.  Cela embolise les places réservées pour les urgences : les personnes aux situations les plus dégradées qui à leur tour doivent patienter gentiment devant la porte. De plus, les messieurs peuvent patienter plusieurs heures dans la salle d’attente. Ils élaborent des stratégies pour voir une assistante sociale et  parfois s’installent dans le bureau de réception des TS même s’ils n’ont pas de rendez-vous.

Les Vigiles

Ils sont en première ligne de l’agacement et l’agressivité des messieurs, ils interviennent au-delà de leur mission pour baisser la nervosité des messieurs et ont même dû effectuer un accueil en remplacement des sms les semaines du 26 décembre et celle du 16 janvier pour orienter les personnes.

Médiatrice

Comme pour les vigiles, elle est en première ligne car c’est elle qui annonce aux personnes qu’elles ne peuvent pas entrer et devront revenir.

Permanenciers

Leurs difficultés restent essentiellement liées à l’utilisation ou la non accessibilité des logiciels ISIS …Ils finissent pas perdre patience et désertent notre service faute de matériel et d’organisation.

Saad (instruction RSA/aides légales/MDPH/standard)

La difficulté de compréhension de l’accueil dégradé  a amené  les messieurs lors des entretiens SAAD à penser qu’ils étaient  reçus par un travailleur social.  Ce qui a créée des tensions supplémentaires et une perte de temps pour tout le monde. Ce service est pourtant déjà en grande souffrance : absence de cadre pendant plus de 9 mois à un moment crucial : quand les agents de guichet ont dû accepter de nouvelles tâches avec une montée en compétence sans aucune formation. Là où la position actuelle en EPS est de recruter uniquement des SMS pour  l’instruction des aides légales. Rappelons que ces agents catégorie C qui reçoivent le public toute la journée (et aussi pendant le confinement)  ne perçoivent pas le Ségur.

Psychologue :

Dans le cadre de ses entretiens, la psychologue recueille la parole des messieurs qui font état de la violence administrative que leur fait subir la PSA alors même qu’ils y viennent chercher conseils, soutien et accompagnement. Il arrive régulièrement que la psychologue débute un suivi et voit à plusieurs reprises des messieurs qui, du fait du délai d’attente, ne rencontreront leur assistante sociale que trois mois plus tard. Ce délai d’attente empêche un travail pluridisciplinaire et le regard croisé sur les situations mais surtout, implique de prendre un charge des personnes qui se dégradent psychiquement du fait d’une absence de prise en charge sociale.

Accompagnement

Nos dossiers urgents n’ont pas  été traités durant une période. Seuls quelques FSL, DLH  et ARPP le sont actuellement : les  Fiches Ep, fiches d’orientation vers les EPS, PSA Gauthey, CER, convocation  CER sont toujours en attente

Le fait que nos files actives ne soient pas actualisées va enclencher des délais supplémentaires : actuellement 3 mois d’attente : allongement pour avoir un réfèrent.

L’attente des orientations faites habituellement par les SMS a pour conséquence un accroissement des tâches pour les assistantes sociales : Les assistantes sociales d’accueil ou d’accompagnement reçoivent de plus en plus de familles dans le cadre des réunifications familiales : cela demande du temps et des démarches supplémentaires. Or tant que les orientations  vers la PSA Gauthey ne sont pas faites, nous assurons les démarches car cela concerne des familles et enfants qui sont souvent à la rue. Or notre service n’est pas  habitué à accompagner les familles et nous n’avons ni relais ou ni formation.

D’autre part, l’absence de la DACS  depuis 1 an ½, a pour effet un manque de disponibilité des cadres de proximité qui assurent le report des taches non pourvus.

Le manque d’échanges sur les situations complexes, le manque de réunion d’équipe ont un impact à la fois sur les agents et les messieurs. Et les cadres qui aimeraient pouvoir soutenir leurs équipes nous semblent elles aussi en situation de souffrance.

La surcharge de travail des cadres, met en suspend les groupes de travail en cours et les projets interne du service

Alors que fait-on maintenant ?

Des groupes de travail pour élargir nos missions dans le cadre de la réforme des PSA Et ESI…sérieusement, c’est ça que l’on nous propose ?

Nous ne baisserons pas les bras :

A la PSA Bastille, malgré les difficultés institutionnelles persistantes, les équipes n’ont jamais été aussi soudées, aussi solidaires tentant toujours de pallier le manque criant d’effectif pour éviter le naufrage. Mais cette fois, nous nous présentons aussi soudés ensemble et déterminés pour dire que nous ne voulons plus combler les brèches. Nous refusons le report de tâches, nous souhaitons avoir les moyens matériels et humains suffisants pour assurer un accueil et un suivi digne de notre public.

Cela signifie                :

-recrutement massif de secrétaires médico-sociales

- recrutement et création de postes de travailleurs sociaux.

- un allègement de nos  files actives pour permettre un accompagnement de qualité.

- un traitement effectif de nos demandes auprès du SLRH.( gestion des congés/absences, des demandes de formations etc.)

- refus de la substitution de 2 postes AA contre 1 poste SMS

 

Sinon il faut nous indiquer clairement que les objectifs ont changé. Que nous devons augmenter la quantité des suivis et cesser la recherche de qualité.

Ce qui signifie abandonner les objectifs du pacte de lutte contre les exclusions

  • Changer le regard sur le public exclu
  • Développer l’offre de proximité
  • Assurer l’accès effectif aux droits et dispositif d’aide
  • Garantir un accompagnement sans rupture

Commenter cet article